Le 19 décembre 1964, un discours solennel fut prononcé lors de la grande cérémonie officielle où André Malraux, ministre de la Culture, fait entrer Jean Moulin au Panthéon des grands Hommes de la République française. Il fait de lui à cette occasion « le symbole » de l'héroïsme français, de toute la Résistance à lui seul en l'associant à tous les Résistants français, héros de l'ombre, connus et inconnus, qui ont permis de libérer la France au prix de leur souffrance, de leur vie, et de leur idéologie de liberté. Ce discours composé et prononcé par André Malraux est souvent considéré comme un des plus grands discours de la République française.
« Avec
ceux qui sont morts dans les caves sans avoir parlé, comme toi ; et même,
ce qui est peut-être plus atroce, en ayant parlé ; avec tous les rayés et tous
les tondus des camps de concentration, avec le dernier corps trébuchant des
affreuses files de Nuit et brouillard, enfin tombé sous les
crosses ; avec les huit mille Françaises qui ne sont pas revenues des
bagnes, avec la dernière femme morte à Ravensbrück
pour avoir donné asile à l'un des nôtres. Entre, avec le peuple né de l'ombre
et disparu avec elle — nos frères dans l'ordre de la Nuit… »
« C'est la marche funèbre
des cendres que voici. À côté de celles de Carnot avec les soldats de
l'an II, de celles de Victor Hugo avec les Misérables,
de celles de Jaurès
veillées par la Justice, qu'elles reposent avec leur long cortège d'ombres
défigurées. Aujourd'hui, jeunesse, puisses-tu penser à cet homme comme tu
aurais approché tes mains de sa pauvre face informe du dernier jour, de ses
lèvres qui n'avaient pas parlé ; ce jour-là, elle était le visage de la
France... »
Ce discours légendaire fut suivi du Chant des Partisans interprété par une
grande chorale devant le Panthéon.